A LA DECOUVERTE DE BATOUIEV/EKATERINBOURG (RUSSIE) avec Alexeï Ivanov: Le dernier Afghan (Editions Rivages/Noir)

La ville de Batouïev où se déroule le roman est fictive. Mais, selon les connaisseurs de la Russie, elle est inspirée de Ekaterinbourg, la quatrième ville de Russie avec Un million et demi d’habitants. Elle est le centre administratif du district fédéral de l’Oural. Au pied du massif de l’Oural, elle constitue le passage naturel entre la Russie européenne et la Sibérie. « Tout autour s’étendait la ville de Batouïev, avec ses immeubles de cinq étages typiques et ses peupliers d’avril. Ses câbles, tramways, feux tricolores, petites voitures et piétons. (…) Les peupliers n’étaient pas à la taille de Batouïev, les rues n’avaient pas la largeur requise. Les béances ouvertes par des chantiers qui s’éternisaient étaient dissimulées derrière de longues palissades. La ville, grande, mais encore grossière, se tapissait derrière les épaules de gratte-ciel disposés de biais. (…) Guerman fila sans encombre sur les boulevards des quartiers dortoirs, à travers les zones industrielles et la banlieue pavillonnaire. (…) Dans le centre, au milieu des quartiers du comité de district, des tours dressaient leurs multiples facettes de verre noires et bleues, presque aussi hautes que des gratte-ciel. »

Guerman Nievoline, surnommé l’Allemand en raison de son prénom, est le chauffeur d’un fourgon blindé qui transporte des sacs d’argent qui contiennent la recette d’un centre commercial. Il braque les autres convoyeurs de fonds, transfère le butin dans le coffre de sa voiture puis l’enterre dans une cave secrète de la datcha du père de sa compagne, Tatiana qui n’est au courant de rien. Il règle des dettes, place une partie de l’argent et veut quitter la ville pour échapper à ses poursuivants.

Guerman est un ancien soldat soviétique de la guerre en Afghanistan. Il y est sorti de justesse d’un guet-apens tendu par les Basmatchis, les partisans pachtounes, après être resté dans un réduit de rochers avec l’aspirant Sergueï Likholietov et deux autres soldats.

Après la guerre, il s’est trouvé parmi les nombreux laissés pour compte de ce conflit, des « Afghans », sans formation, ni ressources. Likholietov lui a proposé de le rejoindre et de faire partie avec lui du Komintern, l’union des vétérans de la guerre en Afghanistan. Il conduisait car appartenant à l’organisation et servait de chauffeur à Likholietov qui était le chef de ce Komintern qui, pour défendre les intérêts de ses Afghans, menait toutes sortes d’activités légales et parfois criminelles. Il avait ainsi forcé des marchands à abandonner le terrain vague où ils faisaient leur commerce et à s’installer, moyennant finance, dans un hangar devenu un centre commercial miteux. Les Afghans avaient occupé, en toute illégalité, deux tours d’immeuble et s’étaient opposés par la force aux tentatives d’expulsion avant de s’incliner devant l’assaut des forces spéciales. Des affrontements violents les opposaient à une bande de truands pour le contrôle de la vente d’alcools.

La municipalité, lasse de cet Etat dans l’Etat, s’en est pris au quartier général du Komintern et a fait appréhender plusieurs responsables dont Likholietov qui a passé quatre ans en prison sans jugement. Pendant ce temps, la direction de l’union a connu des règlements de comptes sanglants. Guerman en était resté à l’écart jusqu’à son coup d’éclat.

« Le dernier Afghan » revient sur le destin de ces soldats de l’armée soviétique qui se sont battus en Afghanistant et ont dû battre en retraite. A leur retour, ils n’ont pas été accueillis en héros à l’issue de cette guerre de la honte, à un moment où le communisme et l’Union soviétique s’effondrait d’abord sous Gorbatchev puis Eltsine.

« Le dernier Afghan » revient sur le destin de ces soldats de l’armée soviétique qui se sont battus en Afghanistan et ont dû battre en retraite. A leur retour,  ils n’ont pas été accueillis en héros à l’issue de cette guerre de la honte, à un moment où le communisme et l’Union soviétique s’effondraient d’abord sous Gorbatchev puis Eltsine.

Likholietov est un personnage romantique et nostalgique qui ne se résout pas à cette marginalisation et veut rassembler ces Afghans dans une organisation qui fera valoir leurs droits. Mais il est dépassé par les événements et d’autres responsables, plus pragmatiques, qui deviennent de redoutables hommes d’affaires, prêts à pactiser avec le pouvoir en place pour arriver à leurs fins, tout en n’abandonnant pas le recours à la violence.

Guerman est un homme droit, sans ambition qui essaie de trouver une place dans ce marigot, pour lui et la douce Tatiana.

Un thriller où les retours en arrière sont nombreux et éclairants sur ses divers personnages et qui est révélateur de cette page de l’histoire récente de la Russie. Passionnant.