A LA DECOUVERTE DE STOCKHOLM (SUEDE) avec Maj Sjöwall et Per Wahlöö: L’abominable homme de Säffle (Union générale d’Editions et 10/18)

« Elle descendait maintenant Vasagatan, passant devant le Sheraton Hotel tout neuf et la gare centrale, et, une fois arrivée sur la place de Norra Bantorget, elle continua en direction du nord le long de Torsgatan. Sur cette place se trouvait un arbre illuminé et l’autobus n°591 qui attendait à son terminus. Au-dessus de la place Saint-Eric, la pleine lune brillait et les aiguilles de néon bleu de l’horloge de l’immeuble Bonnier indiquaient l’heure. (…) Ils tournèrent à droite et continuèrent en direction de l’église Gustae-Vasa et d’Odenplan. A la station de taxis deux voitures attendaient d’éventuels clients et, près de la Bibliothèque municipale, une balayeuse au clignotant orange attendait pour sa part le feu vert. (…) A la hauteur de l’Ecole supérieure de Commerce ils prirent à gauche dans Kungstensgatan. (…) Le soleil matinal éclairait Strömmen, endroit par lequel le lac Mälar communique avec la Baltique. (…) Au loin, le long du quai de Stadsgärden, se trouvait un vieux vapeur à la grande cheminée bien droite. (…) L’un des premiers bacs de la journée pour Djurgarden fendait les eaux de son étrave qui bruissait légèrement. »

3 avril 1971. Le commissaire Stig Nyman, hospitalisé en raison de violentes douleurs au ventre, est sauvagement assassiné dans sa chambre par un homme qui l’égorge et l’éventre avec une baïonnette. Le meurtrier jette l’arme par la fenêtre et s’enfuit à l’insu de tous. Dix minutes plus tard, une infirmière appelle Police secours. L’inspecteur Rönn et le commissaire Beck, de la brigade criminelle, arrivent rapidement sur place. Ils rendent ensuite visite à sa femme et à son fils adolescent. Elle ne lui connaissait aucun ennemi. Il n’avait reçu aucune menace. Policier exemplaire, il n’avait aucun ami ni collègue proche dans la police.

Le son de cloche est très différent parmi les policiers. Nyman passait pour un homme dur, intransigeant envers ses subalternes. Il pouvait être extrêmement brutal avec des personnes interpellées. Son comportement avait fait l’objet de multiples plaintes, toutes classées sans suite, et lui avait valu le sobriquet d’abominable homme de Säffle, son village d’origine. Il est cependant admiré par Harald Hult, un brigadier qui le connaissait depuis plus de trente ans et le juge irréprochable. Hult est un homme solitaire qui vit en spartiate dans un appartement modeste et se consacre exclusivement à son travail. Son attitude intrigue Martin Beck qui veut en savoir plus sur lui.

L’attention des enquêteurs se porte sur la plainte déposée par Ake Eriksson, un ancien policier licencié quelques années plus tôt pour faute grave et qui vit, vaille que vaille, de petits boulots. Sa femme, victime d’une crise d’épilepsie dans la rue, avait été embarquée par des policiers qui la croyaient ivre. Conduite au commissariat dirigé par Stig Nyman, elle avait été enfermée sans soins dans une cellule et était morte peu de temps après. Alors que l’enquête progresse, Martin Beck se sent gagné par l’inquiétude. A juste titre. Un tireur fou s’en prend à d’autres policiers.

« L’abominable homme de Säffle » suit le même schéma que celui des autres romans de Maj Sjöwall et Per Wahlöö : une enquête minutieuse de policiers qui examinent tous les moindres détails qui pourraient les aider à faire progresser leurs recherches, les indices matériels, en l’occurrence peu utiles, la personnalité de la victime, aussi complexe que repoussante, les mobiles et suspects possibles. Les enquêteurs sont confrontés à l’hostilité croissante de la population à l’égard de la police.

Martin Beck se heurte à l’incompréhension d’un supérieur très éloigné des réalités du terrain et qui croit connaître le métier de policier à travers des films et séries télévisées qu’il regarde. Sans temps morts, dans un style privilégiant les phrases courtes, le roman ne se lit pas. Il s’avale.